C’est vers 475 que l’évêque
et le clergé quittèrent Alba pour venir s’installer à Viviers,
sur le rebord oriental d’un promontoire rocheux dominant le Rhône.
Au XIe siècle, les évêques-comtes
du Vivarais entreprirent la construction d’une vaste enceinte autour de
la cathédrale et de son cloître, du palais épiscopal et des
bâtiments canoniaux. Une tour-porche en constituait l’entrée
monumentale ; ce sont le rez-de-chaussée et le premier étage
de l’actuelle tour Saint-Michel.
Au début du XIIe siècle, les chanoines
firent aménager dans le premier étage de la tour une chapelle dédiée à saint
Michel. Elle est de plan carré, avec des murs légèrement
cintrés et un décor d’arcatures et de colonnes aux chapiteaux
sculptés reposant sur un mur-bahut faisant le tour de la pièce.
Pour permettre l’accès à cette chapelle,
on creusa un escalier à vis dans l’épaisseur du mur du rez-de-chaussée,
car jusque là, la porte ouverte dans le mur oriental donnait sur le vide ;
on a pensé qu'il avait peut-être été prévu un passage aérien pour relier directement
la chapelle Saint-Michel à la cathédrale, mais que celui-ci n'avait
jamais été réalisé.
Chapelle Saint-Michel. |
L'abside |
L'abside semi-circulaire, voûtée en cul-de-four, ne regarde pas l’orient, mais l’occident.
La coupole octogonale, sur trompes coniques, est très profonde, avec des voûtains nettement marqués. Sur chaque trompe, sculpté en méplat et très stylisé, le symbole d’un des évangélistes tenant chacun son livre : l’aigle de saint Jean ; le taureau de saint Luc ; l’ange de saint Matthieu et le lion de saint Marc, avec la queue terminée par une flèche.
Et ce qui surprend peut-être le plus dans cette chapelle, c’est l’ornement des huit pans de la coupole dont pratiquement chaque pierre porte, gravé ou sculpté en méplat, des lettres, des noms, des motifs symboliques ou purement décoratifs, des personnages, des animaux, le tout sans aucun ordre apparent.
La coupole dont les trompes portent les symboles des quatre évangélistes. |
L'aigle de saint-Jean |
Le taureau de saint Luc |
Le lion de saint Marc |
L'ange de saint Matthieu |
Deux exemples du décor des pans de la coupole. À gauche, on reconnait une partie de la Cène (Le Christ est le troisième personnage à partir de la gauche). |
Chapiteau d'une des colonnes supportant la coupole |
Détail de la corniche à la base de la coupole |
Christiane Bernard a attiré notre attention sur un élément qui passe très souvent inaperçu, du fait de sa position. Il s'agit d'une pierre sculptée réemployée au-dessus de la fenêtre percée dans l'arcature centrale de l'abside. Elle nous la décrit ainsi :
Pierre réemployée dans la chapelle Saint-Michel, au-dessus de la fenêtre ouverte dans l'arcature centrale de l'abside. (Cliché Christiane Bernard) |
Il s'agit d'un motif que l'on retrouve souvent sur les piliers ou plaques de chancel carolingiens : une hélice à pales (ici au nombre de 4, souvent 3), motif sans doute dérivé du symbole solaire celtique que l'on trouve à Cruas (et qui figure aussi sur certaines pierres carolingiennes).
Ce motif figure sur des pierres de cette période trouvées à Nice, Aix-en-Provence et Marseille, Vaison-la-Romaine, Flavigny en Bourgogne et en Italie à Vintimille entre autres.
Ici la pierre est cassée sur sa partie droite : l'une des pales est tronquée à son extrémité. Cette pierre peut provenir de l'un des édifices antérieurs à la cathédrale du xiie siècle, mais pourrait aussi provenir de l'ancienne église Notre-Dame (devenue Notre-Dame du Rhône) dont les fouilles ont fourni un autre fragment carolingien à entrelacs, conservé par Y. Esquieu dans les locaux de l'ancien évêché, actuellement Hôtel de Ville.
La trompe sud-ouest ornée de l'ange de saint-Matthieu (en haut à gauche de l'image) comporte le même motif en hélice que celui situé au-dessus de la fenêtre de l'abside |
J'attire ici l'attention du lecteur (qui pourra, je l'espère, redevenir bientôt visiteur, la tour étant actuellement interdite d'accès) sur un détail de décor qui me semble intéressant : la présence d'un autre motif à hélice dans la chapelle.
Saint-Michel, chapelle occidentée, érigée au premier étage de la
tour, date du xie siècle. On ignore
quelle en fut la couverture initiale : probablement une charpente ;
mais vers le milieu du xiie siècle la
chapelle se vit couverte d'une belle coupole octogonale barlongue
avec quatre trompes d'angle coniques ornées des symboles des évangélistes
(voir plus haut).
Quand on se tient face à l'abside devant le remploi en forme d'hélice,
la trompe gauche (sud-ouest) est ornée de l'ange de saint Matthieu.
On peut lire au-dessus de l'ange un mot que je n'ai pu déchiffrer :
BELAN d'après Robert Saint-Jean (est-ce une signature de compagnon ?).
Le détail qui fait l'objet de cette note figure parmi les quatre
motifs ornant
l'arc de la trompe au-dessus de l'ange. Le premier motif à gauche est en effet
une hélice à pales (ici au nombre de trois, voir plus haut).
Le compagnon semble avoir voulu faire un rappel du motif au centre
de l'abside ; les deux motifs sont parfaitement visibles ensemble
dans l'axe ouest (Robert Saint-Jean, Vivarais Gévaudan romans, éd.
Zodiaque,1991, planches 12 et 13).
Christiane Bernard