En 1987, dans « L'Ardèche »,
ouvrage collectif réalisé sous la direction de Michel Carlat,
j'ai publié sur le thème: « Les signes symboliques
de l'art populaire du Bas-Vivarais ».
Depuis, j'ai poursuivi un inventaire permanent qui m'a permis d'améliorer
la connaissance sur le sujet, en particulier de comprendre les moyens de diffusion
des symboles, motifs et signes représentés. Il était important
pour moi de tenter d'en identifier les auteurs, malgré un évident
manque d'informations sur le sujet. Ce n'est qu'à partir de nombreuses
observations et de quelques rares documents que j'ai pu identifier quelques artisans
satisfaits de leur travail et ayant signé leur ouvrage.
Il s'agit, en général, de décors appliqués
sur les ouvrages que sont les porches de maison et les portes, les croix de mission,
les ferronneries diverses et les meubles. On en trouve aussi à titre d'enseignes
comme les bouquets de saint Éloi, ou bien comme marques de compagnons
et parfois à caractères « mascarons ».
L'analyse et la forte présence de ces décors nous confirment
un apport culturel loin d'être négligeable ; actuellement,
nous n'avons guère l'occasion d'admirer un beau porche sur un mas moderne !
Croix à Ribes |
On note, en particulier, pour réaliser une
porte d'entrée et son encadrement, la parfaite coordination entre
le maçon-sculpteur, le menuisier-sculpteur et le ferronnier-serrurier
adaptant avec goût les matériaux principaux utilisés :
pierre, bois, fer. Un tel ensemble de qualité, qui a suffisamment
résisté aux atteintes du temps et des hommes, mérite
bien d'être considéré comme un chef-d' œuvre,
puisqu'il témoigne de la qualité des compagnons d'alors.
Il ne s'agit pas là d'ouvrages spontanés, mais bien pour
la plupart de motifs ou de symboles récurrents que l'on retrouve
utilisés dans les mêmes conditions dans différentes
régions de France. C'est Agricol Perdiguier, « Avignonnais
la vertu » (1805-1875), qui nous confirme cette forte présence
du compagnonnage ardéchois dans son livre « Mémoire
d'un compagnon » dans lequel il cite dix compagnons portant
le surnom « Vivarais ». À part
des millésimes plus anciens, beaucoup plus rares, et des motifs à caractères
religieux, chrismes, calices, les dates inscrites se situent en
majorité entre
1750 et 1850. Le motif curviligne, au tracé très élaboré,
est fort présent dans l'Ardèche entre ces deux dates.
Ces décors, autant sur les porches que sur les croix, sont en relation
avec la forte progression de la population, le défrichement et la mise
en cultures de terroirs difficiles.
L'art populaire peut être considéré comme une valorisation
de l'acquis, aussi bien sur le plan de la formation professionnelle que sur les
aspects visuels de l'architecture et de l'environnement. Il est évident
que cela impose un autre regard et mérite d'être sauvegardé.
Labeaume |
Saint-Andéol de Fourchades |
Rampes de balcon à Montpezat et Burzet par Peruchon (1844 - 1845) |
Largentière
Divers frontons |
Armoires à Vinezac |
Texte et dessins : Michel ROUVIÈRE