On trouvera ici une présentation succincte de trois maisons fortes typiques du plateau vivaro-velleve, maisons qui ont entre elles des relations sur le plan historique du fait des liens entre les familles qui y ont résidé.
Le Cros de Lafarre (cliché C. Bousquet) |
À proximité du village de Lafarre, ancienne paroisse du
Vivarais, se trouvent deux constructions fortifiées. La
première, ancien château féodal, domine la vallée de la
Loire au-dessus de son confluent avec la Langougnole.
Elle n’est accessible que par une marche d’environ 1 km à partir du village. Il n’en reste plus aujourd’hui qu’une
tour carrée (ancien donjon ?) connue sous le nom de
Tour de Mariac et quelques pans de murs qui pourraient être des vestiges de rempart.
Au hameau du Cros, face à cette tour, sur l’autre rive de
la Langougnole, se dresse une grosse maison forte
flanquée de deux tours rondes et une carrée. Son origine
daterait, d’après certains textes, du xie siècle où on la
trouverait mentionnée dans une bulle papale. Remaniée
ultérieurement au xive siècle, c’est au xvie qu’elle aurait
pris son aspect général actuel. Mais l’observation, en
particulier des croisées, montre qu’elle a certainement
subi d’autres modifications plus récentes.
Au fil des siècles, elle fut la propriété de plusieurs
familles. L’une des plus représentatives fut, pendant deux
siècles, celle des Châteauneuf de Rochebonne, de qui
elle passa aux Audoyer. Connue originellement sous le
nom de Audeyer, cette famille, d’après Christian Foriel-
Destezet (voir références), était originaire du Dauphiné,
probablement de la ville de Die. Messire Alexandre
Audeyer était, en 1551, « juge royal de la Cour commune
de Grenoble ». Son fils Antoine épouse en 1581 « demoiselle Antoinette de Châteuneuf de Rochebonne,
dame et maistresse des seigneuries de Châteauneuf, la
Varenne, et le Cros de Montbel », sur la paroisse de Saint-
Paul-de-Tartas où elle réside. Elle en fait donation à son
mari, avec, vraisemblablement, le Cros de Lafarre. Un de
leur fils, Jacques, épousera Magdelaine Arnaud du Fau de
la paroisse de Burzet où il fera souche. Un autre, Louys,
s’établira sur la paroisse de Bozas après avoir épousé
demoiselle Marie de Boze.
Située sur la commune de Salettes en Haute-Loire, dans le village du même nom, cette grosse maison forte fut la propriété des Ytier de Géorand qui en seraient les premiers bâtisseurs. Au début du xviiie siècle, elle passe aux Vogüé. Dans son ouvrage, Melchior de Vogüé nous explique comment. Le propriétaire en était alors le marquis de Givry, cousin de Cerice-François de Vogüé (il est intéressant de noter ce prénom, qui renvoie à la chapelle de la Gleyzette située au-dessus du château de Vogüé et dédiée à Saint Cerice). « Les deux cousins germains étaient en relation constante ; Soubray n’est pas très loin de Vogüé ; une bonne journée de cheval suffisait pour se rendre d’un château à l’autre. Bientôt, Givry se fatigua de ces fréquents voyages ; il prit l’habitude de séjourner à Vogüé : il y avait sa chambre, ses livres... la mort le surprit pendant un de ces séjours ». Il légua tous ses biens à son cousin « en reconnaissance des soins affectueux qu’il en avait reçus ». « La terre de Soubrey était d’une médiocre qualité, mais d’une grande superficie ; elle s’allongeait sur les hauts plateaux qui séparent le Velay du Vivarais... Bordant, d’un côté, le territoire de Coucouron, de l’autre, celui de Mayres, elle reliait la terre de Montlaur à celle d’Aubenas... Sa juridiction s’étendait sur plusieurs paroisses : Sallette, Le Cros de Géorand, Saint-Cirgues. » La famille de Vogüé prit l’habitude d’y faire « de fréquents déplacements : toute la maisonnée s’y transportait, les petites filles dans la litière, la dame en chaise à porteurs, les autres à cheval ou à mulet. Le voyage durait trois jours. On couchait à Pradelles ou à l’abbaye de Mazan, à Laulagnet, quelquefois à Aubenas. »
La Mouline* (cliché C. Bousquet) |
En contrebas de la route qui
mène d’Issarlès à Lachapelle-
Graillouse, elle est difficile à
voir, surtout en été où elle est
noyée dans la végétation. En bord de route, une borne
indique l’entrée de la
propriété.
Flanquée d’une tour carrée, elle fut, aux xviie et xviiie siècles, la propriété des Reynaud, notaires royaux. Sieur
Marc Reynaud, né vers 1650, marié avec demoiselle Marie
Chapuis, fille de demoiselle Françoise Audoyer, fut, en
plus de sa charge de notaire royal, rentier de Soubrey où
il résida de nombreuses années. Il s’installa à La Mouline
vraisemblablement au décès de son père.
*NDLR - Nous tenons à remercier tout particulièrement les membres de la famille propriétaire de La Mouline qui nous ont non seulement permis, mais même facilité, la prise de photographies de leur demeure.
Guy Delubac