Immédiatement au nord de Tournon, au confluent du Rhône et du Doux, la petite ville de Saint-Jean-de-Muzols était un port actif dès l'Antiquité.
Sur la place de l'église, au bord de la R.D. 86, posée sur un sarcophage probablement du haut Moyen-Âge, a été placée une stèle, datant du début du iie siècle de notre ère, portant une dédicace des nautes du Rhône à l'empereur Hadrien. Connue depuis 1533, extraite vers 1860 d'un mur de l'abside de la chapelle Saint-Estève, cette stèle était le piédestal d'une statue élevée à Hadrien.1Imp(eratori) Caes(ari) divi
Traiani Parthici
fil(io) divi Nervae
nepoti Traiano
Hadriano Aug(usto)
pontif(ici) max(imo) trib(unicia)
potest(ate) III co(n)s(uli) III
n(autae) Rhodanici
indulgentissimo
principi2
Ce qui peut se traduire ainsi :
« À l'empereur Cesar, fils du divin Trajan le Parthique, petit-fils du divin Nerva, Trajan Hadrien Auguste, grand pontife, revêtu de la puissance tribunicienne pour la troisième fois, consul pour la troisième fois, les nautes du Rhône à leur très bienveillant prince ».
Cette stèle a été classée Monument historique le 17 septembre 1943.
Saint-Jean-de-Muzols conserve une très ancienne église dont l’origine, qui n'est pas connue avec certitude, peut être estimée préromane.
Selon Albin Mazon, cette paroisse a été formée par la réunion de trois chapelles rurales dont l'une, dédiée à saint Jean-Baptiste, est devenue l'église paroissiale du lieu, car étant la plus centrale. Elle fut d'abord possédée par un chanoine de Saint-Maurice de Vienne, ensuite par un chanoine de la cathédrale de Valence. En 1312, elle a été annexée par l'archevêque de Vienne à la manse du prieuré de Saint-Georges de Crussol, dépendance de l'abbaye de Cluny, puis à la cure de Tournon.
C'est un simple bâtiment rectangulaire terminé par une abside semi-circulaire, plan qui contribue à suggérer une origine très ancienne.
La façade occidentale est percée de deux fenêtres géminées trilobées ; en revanche, plusieurs autres ouvertures de petite taille présentent une facture archaïque, étant très sommairement entourées de pierres grossièrement équarries et surmontées d’un linteau creusé d’une échancrure en forme d’arc, biseautée dans un cas seulement.
Abside |
Oublions la grande porte rectangulaire de la façade occidentale, qui est un souvenir malheureux de l’époque où l’église a été utilisée comme bâtiment agricole, pour nous intéresser à l’ancien portail, actuellement muré, de la façade méridionale. Il est partiellement enterré du fait de l’exhaussement du sol. L’alternance de claveaux de calcaire blanc et de briques placées de chant suivant les rayons de l’arc évoque un mode de construction de tradition gallo-romaine.
Ses murs n’étant pourvus d’aucun renfort, ni extérieur, ni intérieur, l’édifice a certainement été conçu dès l’origine pour recevoir une simple charpente et non une voûte. L’abside, voûtée en cul-de-four, est décorée d’une arcature. Son arc de tête s’appuie sur deux colonnes engagées par l’intermédiaire de gros chapiteaux sculptés.
D’une facture primitive, ceux-ci s’ornent de masques humains qui, sur celui de gauche, émergent de deux rangs de feuilles. On remarquer la moustache qui se termine en grappes de raisins. À droite, un seul rang de feuilles et une grappe à chaque angle.
Notons que l'édifice est classé monument historique depuis 1952.
Paul Bousquet
Ancienne porte dans le mur méridional |
Ouverture de facture archaïque |
Fenêtres de la façade occidentale |
Chapiteaux de l'abside |