L’église Saint-Martin de Coucouron ne conserve de l’époque romane que son très beau portail sculpté.
On ne sait que peu de choses sur l’histoire de cette église, presque entièrement
reconstruite au xixe siècle. La première mention connue
figure dans un acte de mai 1119 du pape Calixte II qui confirme la possession par le monastère
vellave de Goudet d'un certain nombre d'églises, dont trois situées en Vivarais,
Saint-Martin de Coucouron, Saint-Cirgues-en-Montagne et la chapelle Saint-Philibert (cf note en bas de page).
Il faut ensuite attendre 1583, date à laquelle Nicolas de Vesc est chargé par l'évêque
de Viviers de visiter les différentes paroisses du diocèse pour lui rendre compte
de leur
état à la suite des dévastations que beaucoup d'entre elles ont subies au
cours des guerres de Religion. Pour Coucouron, Nicolas de Vesc trouve l'église « en
bon et deu estat avec les cloches au clocher ». Il note que la population est entièrement
catholique.
Par ce même procès-verbal de visite, nous apprenons qu'au xvie siècle, ce sont les chartreux
de Villeneuve-lès-Avignon qui nommaient à la cure de Coucouron.
Le portail en tuf volcanique rougeâtre et brun s’orne de trois profondes voussures
encadrées par une archivolte au riche décor sculpté de motifs aussi étranges
que variés : personnages, monstres dévoreurs, sirènes… Un de
ces motifs se retrouve sur un chapiteau de l'église de
Lespéron, proche
de Coucouron. Il s'agit d’un
personnage tenant à deux mains un serpent dont la tête arrive au
niveau de son menton et qui s'enroule autour de sa jambe droite.
Les voussures reposent
sur des colonnettes aux chapiteaux sculptés, dont l’un retient particulièrement
l’attention.
Il représente une femme mordue aux seins par des serpents, motif généralement
interprété comme symbolisant le châtiment de la luxure. On retrouve ce motif
en divers autres lieux et notamment, dans la proche région, sur un chapiteau
de l’église
de Langogne. Quant aux oiseaux qui picorent les oreilles du personnage, sont-ils symboles
de la tentation ou de la calomnie ?
La Chapelette |
Dans son ouvrage « L’architecture des églises romanes du Vivarais », Michel Joly émet l’hypothèse que ce portail pourrait être l’œuvre du même atelier que celui qui a réalisé la façade de l’abbatiale du Monastier Saint-Chaffre, qui n’est pas très éloignée de Coucouron. De cette simple hypothèse relative au style du décor sculpté, on en a quelquefois déduit que l'église de Coucouron était l'œuvre des moines de Saint-Chaffre, ce qui ne peut être le cas, car cette église n'a jamais dépendu de l'abbaye vellave.
Dans l'église on peut admirer un Christ en croix de grande taille, admirablement sculpté dans le chêne, œuvre d’art que l’on date du XVIIe siècle.
En face de l’église se trouve un petit édifice. tout simple, de pur style roman, datant pense-t-on généralement du XIe siècle, qui est parvenu intact jusqu’à nous. C’est une petite chapelle, dont on dit qu’elle était peut-être le point de départ d’un chemin de croix qui montait jusqu’au sommet de la Laoune, le petit volcan qui domine Coucouron. On l’appelle la « Chapelette » ou encore « Notre-Dame de Pitié ».
Note : Cet acte du pape Calixte II est cité par Isabelle Cartron dans son ouvrage Les pérégrinations de Saint-Philibert (Presses universitaires de Rennes, 2009).
Mais cet auteur situe Coucouron dans le canton de Solignac-sur-Loire en Haute-Loire. Un lieu-dit Coucouron existe bien, en effet, sur la commune de Solignac, mais il ne s'agit que d'un petit hameau qui n'a jamais possédé d'église paroissiale, ni même, semble-t-il, de chapelle.
Pour nous, il ne fait aucun doute que l'église Sancti. Martini Corconensis mentionnée dans l'acte précité soit celle de la paroisse de Coucouron en Vivarais, région dans laquelle le prieuré de Goudet possédait également l'église de Saint-Cirgues-en-Montagne et la chapelle Saint-Philibert, près de Lanarce.
Cf. P. Bousquet, « Les implantations monastiques de Lavillatte et de Goudet », À la découverte des monastères de la Montagne, Actes du colloque des 2, 3 et 4 septembre 2011, Notre-Dame des Neiges (Saint-Laurent-les-Bains, Ardèche), édition Mémoire d'Ardèche et Temps Présent et Société de Sauvegarde des Monuments anciens de l'Ardèche - 2012.
Paul Bousquet
Portail de l'église Saint-Martin de Coucouron |